Histoire de la chartreuse

les 7 distilleries de la chartreuse

1605 - 1737
Monastère de Vauvert

Monastère de Vauvert

1605 - 1737  (Paris)

En 1258, les chartreux sont invités par le roi Louis IX, dit « Saint Louis », à résider dans le château de Vauvert situé à Paris, au cœur de l’actuel jardin du Luxembourg. Ils y fondèrent le premier monastère chartreux suburbain et un lieu bordé de jardins pour l’art des plantes et la pharmacopée, un des savoirs des moines. La pharmacopée est une tradition ancienne pratiquée dans les monastères depuis le Ve siècle. Au Moyen Âge, les ordres religieux commencent à confectionner ce qu’on appelle des « élixirs » dont nul ne connait la composition, mais à qui on attribue des vertus de jouvence et de santé.
Au fil du temps, les chartreux apprennent à distiller l’alcool et affirment leur réputation dans le royaume de France et à Paris. Depuis le XVIe siècle, les pépinières sont installées au monastère de Paris ce qui permet aux moines chartreux de cultiver leurs plantes et leurs arbres à fruits sur vingt hectares de terrain.
1605 : un secret qui bouleverse la vie économique des chartreux.
C’est au regard de leur réputation que le Maréchal François Hannibal d’Estrées leur confie, en 1605, un manuscrit porteur d’une recette secrète faite de 130 plantes, fleurs, racines, baies et écorces. Ce mystérieux manuscrit, décrivant la composition d’un « élixir de longue vie », va être le point de départ d’une recherche qui va durer près de trois siècles, à Paris, au monastère de la Grande Chartreuse et à Fourvoirie.

1737 - 1864
Grande Chartreuse

Monastère de la Grande Chartreuse

1737 - 1864  (Saint-Pierre-de-Chartreuse)

En 1737, Dom Michel Brunier Lafarge, prieur de la Chartreuse et général de l’Ordre, ordonne le transfert du manuscrit au monastère de la Grande Chartreuse. Les Frères André et Bruno sont alors chargés de travailler à sa mise en œuvre et de trouver l’élixir le plus parfait.
Cette quête donnera naissance, grâce à Frère Jérôme Maubec, à un produit définitif fixé en 1764 appelé « l’élixir végétal de la Grande Chartreuse » : depuis, la recette reste inchangée.
Tout au long de ces années, les connaissances des moines leur permettent de faire évoluer l’élixir. Pour affiner leur savoir, ils acquièrent de nouveaux livres et reconstituent leur bibliothèque saisie pendant la Révolution française. La mélisse est mise au point en 1838 par le Frère Bruno Jacquet et se caractérise par une couleur blanche.
En 1840, la Chartreuse verte surnommée « liqueur de santé » est élaborée, reprenant la recette de base de l’élixir végétal. La même année, une nouvelle recette jaunâtre plus douce est mise au point par le Frère Colomban, respectant également le même ensemble de plantes issu du manuscrit : le Frère Bruno Jacquet s’en inspire et finalise la Chartreuse jaune, qui prendra le nom de «Reine des liqueurs».

1864 - 1903
Fourvoirie

Distillerie de Fourvoirie
1ère période

1864 - 1903 -  (Saint-Laurent-du-Pont)

En 1862, face à la croissance des ventes, la pharmacie du monastère devient trop petite pour la fabrication et le stockage de l’élixir et des Chartreuses verte et jaune. Pour des besoins d’agrandissement et de sécurité évidents, une distillerie est alors construite sur le site de Fourvoirie à Saint-Laurent-du-Pont, non loin du monastère.
Sa production commence en 1864.
Dans le même temps, Voiron devient également un lieu d’entrepôt des liqueurs. La mise en place de la ligne de train VSB permet d’ailleurs le transport des tonneaux et foudres de stockage et de vieillissement.
Le 14 avril 1903, on annonce la fermeture du monastère. Le 29 avril, des soldats viennent chercher les chartreux à la Grande Chartreuse afin de les expulser, sous les protestations de la foule dauphinoise qui s’y oppose. Extrait du livre CHARTREUSE, LA LIQUEUR, cité par le Vicomte de Vaulserre avant le départ des chartreux pour l’Italie : « Lorsque vous n’entendrez plus tinter les cloches de nos villages, rappelez-vous que vous avez laissé, en Isère et en Savoie, une multitude d’amis pleins de piété, de reconnaissance pour les saints ermites de la Chartreuse ».

1904 - 1989
Tarragone

Distillerie de Tarragone

1904 - 1989  (Espagne)

À la suite de l’expulsion des chartreux, le liquoriste Cusenier récupère la marque et les installations en France. La « Compagnie Fermière » est alors créée dans le but de reprendre la commercialisation des produits.
La plus grande partie de la communauté se réfugie dans le monastère de Farneta en Toscane, pendant que les autres se rendent en Espagne où ils installent leur distillerie dans la ville de Tarragone et reprennent la production des liqueurs en 1904.
Mais, en France, la contrefaçon se développe, et la Compagnie Fermière tente de s’approprier par tous les moyens les produits des chartreux et d’imposer son monopole sur la liqueur. À nouveau, des procès ont lieu afin d’empêcher les moines chartreux d’exporter leurs produits de Tarragone. Mais ceux-ci reprennent alors le contrôle de la liqueur grâce au soutien d’entreprises fidèles, et surtout, à la qualité de leur production en opposition à celle que la Compagnie Fermière fabrique en France.

1921 - 1932
Marseille

DISTILLERIE DE MARSEILLE

1921 - 1932

En 1920, les chartreux parviennent à reprendre en France la distribution de leurs produits, mais, n’ayant pas encore obtenu l’autorisation de réintégrer leur monastère et la distillerie de Fourvoirie ne leur appartenant plus, c’est à Marseille qu’ils s’installent, au 15 rue de l’Obélisque, actuelle rue Louis Maurel.
Un document officiel de 1922 affirme que la société qui met en vente ces produits est nommée « Brézun, Durand et Ripert ».

Elle fonctionne jusqu’au début des années 1930 puis devient ensuite un lieu de dépôt pour la liqueur.

1905 - 1932
Fourvoirie

Distillerie de Fourvoirie
Seconde période

1932 - 1935 -  (Saint-Laurent-du-Pont)

Après leur retour en France par Marseille, les moines chartreux reprennent en 1929 leurs droits et la marque « Compagnie française de la Grande Chartreuse » est créée. Le site de Fourvoirie fonctionne de nouveau, et les ventes reprennent dans les pays étrangers.
En 1933, les moines restés à Tarragone quittent l’Espagne où la distillation continuera jusqu’en 1989 et reviennent à Fourvoirie.
Malheureusement, une nuit de 1935 un éboulement ravage leurs installations : les chartreux doivent trouver un nouveau lieu de production.

1936 - 2017
Voiron

Distillerie de Voiron

1936 - 2017

Après Marseille les chartreux réintègrent la distillerie de Fourvoirie en plein cœur du massif de la Chartreuse; cette distillerie sera détruite en 1935 par un glissement de terrain. Le site de Voiron est alors choisi pour l’emplacement de la nouvelle distillerie des Pères Chartreux puisque les moines y possédaient déjà une cave et un lieu de stockage. A cette époque, ils transféraient leurs liqueurs depuis Fourvoirie jusqu’à Voiron grâce à la ligne de chemin de fer « VSB » qui reliait Voiron à Saint-Béron par le massif de la Chartreuse. Les activités se développent malgré la crise internationale et tournent au ralenti pendant la guerre.
Les chartreux réintègrent leur monastère véritablement en 1940. Les chartreux distilleront jusqu’en 2017, aux Caves de la Chartreuse, unique site de rayonnement de la marque.
Dans le même temps, démuni des éléments de production et des contraintes règlementaires et sécuritaires, le site des Caves de la Chartreuse a entamé la requalification de son offre touristique, dont les premiers projets se dévoileront à l’horizon 2022.

Depuis 2018
Aiguenoire

Distillerie d'Aiguenoire

Depuis 2018 - (Entre-Deux-Guiers)

En 2014, la règlementation qui encadre les activités de distillation et de stockage se renforce et impose une décision sans appel : la distillerie de Voiron doit déménager dans un site plus sécurisé. Un choix qui imposait un changement majeur pour les chartreux et pour les voironnais, après 80 années de production dans ce site patrimonial. Une transition qu’il était impératif de mener en demeurant fidèle à l’esprit Chartreuse, en transformant la contrainte règlementaire en opportunité à long terme.
Situé au cœur du massif de la Chartreuse, c’est le site d’Aiguenoire à Entre-Deux-Guiers qui a été retenu pour la construction d’une nouvelle distillerie. Ce lieu très symbolique pour les chartreux, a abrité leurs activités piscicoles et agricoles de 1618 à 1791.
L’inauguration de ce nouveau lieu de production a été célébrée le 30 août 2018, 400 ans jour pour jour après la première acquisition du terrain par les chartreux. Il est composé aujourd’hui d’une cave de vieillissement, d’une annexe technique, de la grange des chartreux entièrement réhabilitée accueillant les bureaux administratifs et, depuis le 4 septembre 2020, la nouvelle ligne de mise en bouteille et les services logistiques sont venus compléter les installations.

Toute la production des liqueurs a rejoint le cœur du massif de la Chartreuse : c’est le retour des chartreux et de la Chartreuse en Chartreuse ! La trilogie est complète.

Crédits Photos Page Histoire :
Bandeau : © Pascal Flamant / Vauvert : © Bibliothèque Nationale de France / Marseille : © Fernand Detaille / Aiguenoire : © Stéphane Couchet